À cet égard, les conclusion d’accord et le jugement qui les ratifie offrent une interprétation rassurante de ces dispositions légales : la CPDI prime sur le droit national et, par conséquent, une structure qui qualifie de résident fiscal d'un État au sens de la CPDI doit être considérée comme le seul bénéficiaire des revenus qu'elle perçoit ; ce qui exclut l'imposition sur la base de la transparence fiscale du fondateur de cette entité. Il ne s'agit pas de lutter contre la double imposition économique et juridique, mais de respecter la personnalité juridique fiscale d'une entité reconnue par une convention internationale comme résidente dans un État contractant et que la Belgique s'est engagée à respecter.
Ce raisonnement, développé dans le cas d'un trust canadien, devrait également s'appliquer à une Soparfi luxembourgeoise qui, en tant que société normalement imposée, peut également être considérée comme une construction juridique dans le cadre de la taxe Caïman en application de l'arrêté royal modifié de l'EEE du 21 novembre 2018. Il en est éventuellement de même dans le cas d'une SICAV-SIF luxembourgeoise, dont les actions sont détenues par une seule personne ou plusieurs personnes liées entre elles.
En ce qui concerne la SICAV luxembourgeoise, il existe des arguments juridiques permettant à une société d'investissement luxembourgeoise, qu'elle soit publique ou privée, d'invoquer également l'application de la CPDI, bien que l'administration fiscale belge soit actuellement d'un avis contraire dans le cadre d'un litige concernant la taxe belge sur les organismes de placement collectif.
En tout état de cause, il y avait et il y a toujours des arguments juridiques et fiscaux pertinents pour contester l'application de la taxe Caïman à certaines structures luxembourgeoises. Ce point de vue a déjà été publié dans la doctrine.2
Les résidents fiscaux belges qui, pour l'exercice d'imposition 2019, avaient déclaré par prudence leur structure luxembourgeoise - ainsi que ses revenus, le cas échéant - sur base de l'application de la taxe Caïman (afin notamment d'éviter l'amende élevée de 6.250 EUR), ont, en tout état de cause, des arguments pour s'opposer à l'imposition effective de ces revenus. Le délai d'introduction de la réclamation de 6 mois à compter de la date d'envoi de l’avertissement-extrait de rôle doit être respecté. Si le délai de réclamation a déjà expiré, il est probablement possible de recourir à la procédure de dégrèvement d'office.
Tout dépend bien sûr de la structure luxembourgeoise ou de toute autre structure étrangère utilisée. Il convient d’effectuer une analyse au cas par cas.
N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez plus d’information sur ce qui précède :
Gerd D. Goyvaerts - Partner (gerdd.goyvaerts@tiberghien.com)
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Christophe Coudron - Counsel (christophe.coudron@tiberghien.com)
Dirk Coveliers - Counsel (dirk.coveliers@tiberghien.com)
1 Pour une référence à cet arrêt, voir Maufort, P., Taxe caïman : la taxation par transparence prévue à l’article 5/1 du C.I.R. 92 ne peut s’appliquer aux revenus perçus par une entité qualifiée de résident d’un État contractant par une CPDI, R.G.C.F., 2020/3, p. 141-145.
2 Goyvaerts G.D. en Coudron C., ‘De kaaimantaks als de yin en yang van de Belgische fiscaliteit. Een kritische commentaar bij de invoering van het nieuwe EER-KB en niet-EER-KB’, TFR 2019, 569-570, p. 849-897; Delacroix, P., La taxe caïman, l’extension de la notion de construction juridique à des sociétés européennes serait-elle contraire au droit de l’EU ?, T.B.F, 2019/3 p. 37-68 ; Coudron, C., Taxe caïman, nouvel arrêté royal EEE clôture la discussion relative aux organismes de placement « fonds dédié » privés, T.B.F., 2018/07, p. 48-54.