Pour mémoire
Qu’est-ce que le travail posté ?
Sont éligibles les "entreprises effectuant un travail posté", les entreprises dans lesquelles le travail est effectué en deux équipes d’au moins deux travailleurs, effectuant le même travail tant du point de vue du contenu que de l’importance, et pour autant que ces équipes se succèdent au cours de la journée sans interruption entre les équipes successives et que le chevauchement ne dépasse pas le quart de leur charge de travail journalière.
Qu’est-ce que le travail de nuit ?
Les « entreprises qui effectuent de travail de nuit » sont celles dans lesquelles, conformément à la réglementation du travail applicable dans l’entreprise, les travailleurs effectuent un travail entre 20 heures et 6 heures, à l’exception des travailleurs qui n’effectuent un travail qu’entre 6 heures et 24 heures et des travailleurs qui commencent habituellement le travail à partir de 5 heures.
Raison
En 2019, la Cour des comptes a relevé plusieurs problèmes concernant l’application de ce régime. Ces mêmes problèmes sont rencontrés lors des nombreux contrôles qui ont lieu actuellement (voir notre précédente newsletter).
L’avant-projet poursuit un quadruple objectif, à savoir : 1) répondre aux recommandations de 2019 de la Cour des comptes, 2) renforcer le cadre juridique pour clarifier le champ d’application, 3) atteindre l’objectif budgétaire fixé en procédant à un certain nombre d’ajustements ciblés sans toutefois modifier fondamentalement le champ d’application, les groupes cibles initialement visés et les pourcentages de dispense, et 4) rendre le régime plus conforme à la législation européenne en matière d’aides d’État.
Interprétation du « même travail en termes de contenu et d’ampleur » : pas encore de clarification
Dans la pratique, l’une des principales difficultés à l’application de la dispense de versement du précompte professionnel est l’interprétation de la définition du travail en équipes, selon laquelle « les équipes doivent effectuer le même travail tant en termes de contenu que d’ampleur ». Cela a également été souligné dans le rapport de la Cour des comptes. De plus, il n’existe pas d’interprétation uniforme parmi les fonctionnaires chargés de contrôler cette condition.
Le législateur n’a pas clarifié le concept de travail en équipes, car cette clarification ne serait jamais « neutre ». Selon l’exposé des motifs, un amendement aurait eu pour effet d’élargir ou de limiter sa portée.
Prime de travail en équipes : substance minimale requise
L’un des changements importants concerne la prime (de travail en équipes et/ou de nuit) prévue par la loi : à l’avenir, celle-ci devra comprendre une certaine substance minimale. Pour la prime de travail en équipes, il s’agirait d’un pourcentage minimum de 2 %, pour la prime de nuit d’un minimum de pas moins de 12 % (!) du salaire horaire brut contractuellement payé par l’employeur si le même travailleur effectuait les mêmes prestations hors du cadre, respectivement, du travail en équipes et/ou du travail de nuit. Le législateur justifie le pourcentage de 12% en avançant que la plupart des entreprises accordent des primes plus élevées pour le travail de nuit, de sorte qu’il convient donc de prévoir des pourcentages minimaux plus élevés pour ces primes.
En outre, à partir de 2024, les primes seront soumises à la condition qu’elles soient fixées dans une convention collective de travail, un règlement de travail ou un contrat de travail entre l’employeur et le salarié.
Distinction entre travail en équipes et travail de nuit
Les pourcentages minimaux étant différents pour le travail en équipes et le travail de nuit, les règles applicables en cas de travail en équipes et celles applicables en cas de travail de nuit seront strictement distinguées à l’avenir. Cela aura, entre autres, un impact important sur le fonctionnement de la règle du tiers (voir ci-dessous).
Sans pause ?
Bien que le principe de base reste que les équipes doivent se suivre sans interruption, la tolérance administrative existante qui permet une pause limitée à 15 minutes est consacrée dans la loi. En outre, l’Exposé des motifs précise qu’une tolérance administrative supplémentaire est possible dans des circonstances exceptionnelles (par exemple, dans le cadre des mesures sanitaires pour la lutte contre la pandémie de COVID-19).
Maintien de la norme du tiers, mais impossibilité de cumuler travail en équipes et travail de nuit
L’une des conditions à remplir pour pouvoir bénéficier de la dispense de versement de précompte professionnel pour le travail en équipes et de nuit était que le travailleur doit effectuer au moins un tiers de son temps de travail, sur une base mensuelle, en travail en équipes ou de nuit. Le principe de la norme du tiers est maintenu dans la législation modifiée. Toutefois, il est décidé d’évaluer la norme du tiers séparément pour le travail en équipes d’une part et le travail de nuit d’autre part.
Il ressort également de l’avant-projet de loi que le calcul de la norme du tiers doit se faire sur une base horaire. Ceci est conforme à l’arrêt de la Cour d’appel de Mons du 21/10/2020 et à la circulaire 2021/C/99 du 16 novembre 2021 (voir notre précédente newsletter à ce sujet).
Autres modifications du régime de dispense de versement de précompte professionnel pour le travail en équipes et de nuit
La base de calcul est clarifiée, de sorte qu’il ne peut plus y avoir de discussion sur le fait que le pécule de vacances simple (par opposition au double pécule de vacances) fait partie de la base de calcul.
En ce qui concerne spécifiquement le travail en équipes lié au travail dans le secteur immobilier, une notification obligatoire à l’ONSS est désormais prévue. Cette mesure vise à exclure les employeurs qui n’agissent pas en conformité avec la législation sociale.
Certaines modifications sont apportées sur le plan de la procédure (par exemple, la période de demande de remboursement du précompte professionnel, sur la base des articles 2751 à 2751, est réduite de 5 à 3 ans).
L’avant-projet contient également quelques dispositions spécifiques pour les agences de travail intérimaire (par exemple, en ce qui concerne la charge de la preuve en cas de contrôle dans une agence de travail intérimaire).
Daan Buylaert – Partner (daan.buylaert@tiberghien.com)
Charlotte Meskens – Senior Associate (charlotte.meskens@tiberghien.com)
Kimberley De Plucker – Senior Associate (kimberley.deplucker@tiberghien.com)
Gauthier Bonte – Associate (gauthier.bonte@tiberghien.com)
1 Avant-projet de loi portant réduction de charges sur le travail.